jurisprudence droit de la famille en Israel

Jurisprudence novatrice de la Cour Suprême : Après 58 ans de mariage, l’épouse recevra sa part dans les biens propres de son époux

Un couple s’était marié en 1960, alors que l’épouse avait environ 18 ans. L’union maritale des époux a duré 58 ans et de celle-ci sont nées cinq filles.

En 2018, le père est décédé en laissant un testament. Il légua à son épouse leur résidence principale ainsi que 180.000 shekels. Il légua, à trois de ses filles, ses droits dans un terrain dont il a hérité, ceux concernant un autre terrain, reçu par donation, situé dans le centre du pays et dont les droits se sont transformés en droits sur des appartements en vertu d’un contrat d’échange, ainsi que de l’argent qui se trouvait sur son compte en banque et le contenu de son coffre-fort.

Peu de temps après, la veuve a déposé une assignation dans laquelle elle demandait que soit déclaré, en vertu de la présomption de communauté, qu’elle bénéficie de la moitié de tous les biens de son défunt époux, y compris les biens inscrits à son seul nom, à l’exclusion du terrain qu’il a reçu en héritage.

La veuve a fait valoir que leur mariage ayant été harmonieux pendant de nombreuses années, cela impliquait une communauté de l’ensemble des biens, y compris les biens propres, à moins que ne soit établie une intention explicite de l’une des parties de ne pas partager les biens.

Les filles ont soutenu devant le tribunal qu’un bien propre qui avait été gardé séparé pendant toute la durée de la vie maritale n’appartenait pas à l’autre conjoint à moins qu’il ne prouve l’existence de circonstances le justifiant.

L’affaire a été portée devant la Cour Suprême qui a statué :

–           La question de savoir si les biens propres seront partagés sera examinée en fonction des circonstances de l’affaire.

–           La justification de l’application de la règle de la communauté des biens propres est liée à la qualité de la relation du couple, à la durée du mariage, à la valeur du bien au cœur du litige ainsi qu’aux circonstances dans lesquelles l’époux en a pris possession.

–           La cour d’appel s’est fondé sur la gestion économique et familiale du couple durant leur vie maritale, et sur les preuves présentées par les parties dans le cadre de la procédure, tout en accordant également de l’importance au silence du défunt et au fait qu’il n’a pas précisé à la veuve, même par un document ou tout autre indication, qu’il ne la considérait pas comme un partenaire concernant l’ensemble des biens accumulés pendant leur vie commune.

–           Le jugement donne une importance significative à la durée prolongée de la vie conjugale et au comportement des parties. Il a été déterminé qu’il est probable que si l’épouse avait eu connaissance du fait qu’elle n’hériterait de presque rien de son défunt époux, elle n’aurait pas consenti à signer des documents de renonciation et une déclaration selon laquelle elle ne disposait d’aucun droit, pas plus qu’elle n’aurait accepté que ses filles et ses petits-enfants reçoivent des appartements et alors qu’elle se serait retrouvée presque sans aucun bien.

En outre, l’épouse a reçu une indemnisation très importante suite à un accident de la route, dont le montant a été transféré à son époux bien que les dommages corporels n’entrent pas dans la communauté. Il en résulte, que le mode de vie du couple témoigne également d’une communauté concernant les biens propres.

Que signifie une intention de communauté spécifique

Le système juridique en Israël détermine les modalités de communauté de biens entre les époux en fonction de la date de leur mariage : la règle de la communauté s’appliquera aux couples qui se sont mariés avant 1974, et la Loi sur les relations patrimoniales entre les époux régira  les couples mariés postérieurement.

La communauté spécifique est une création de la jurisprudence. Elle ne trouve pas sa source dans la législation, et la contredit – la Loi sur les relations patrimoniales entre époux exempte en effet de rééquilibrage dans les ressources patrimoniales qui appartenaient au couple avant le mariage ou qui ont été reçues par donation ou héritage.

Néanmoins, ainsi qu’il a été dit précédemment, un tel bien peut devenir commun, lorsque le comportement des parties prouve l’intention de celles-ci de le considérer comme tel.

De quelle manière prouver la communauté d’un bien spécifique

Il existe un certain nombre de paramètres qui constituent une liste non exhaustive, à la lumière de laquelle est examinée l’intention spécifique de communauté. Notamment

L’appartement a-t-il été apporté par l’un des époux lors du mariage ou après celui-ci.

L’appartement a-t-il été reçu pendant le mariage en vertu d’un héritage ou d’une donation.

L’autre conjoint dispose-t-il également d’une résidence ou d’un autre bien propre.

Combien d’années les époux ont-ils vécu dans l’appartement.

La durée du mariage jusqu’à la rupture de la relation ou jusqu’au divorce.

Le prêt hypothécaire sur l’appartement a-t-il été payé en commun.

La rénovation substantielle ou l’ajout important dans la construction financé par les deux conjoints.

Le comportement des parties.

L’atmosphère générale de communauté et d’effort commun.

Il y a une tendance croissante à reconnaître la résidence principale du foyer comme un bien pour lequel il existe une intention de communauté spécifique. En effet, c’est le bien le plus familial qui soit pour le couple, le point culminant de la cellule familiale, dans lequel les enfants communs sont élevés et où il existe un ménage commun.

La charge de la preuve concernant l’intention de partager un tel bien est particulièrement faible, à la différence du partage d’autres biens.

La participation du conjoint au financement de la rénovation d’un appartement est considérée comme une indication claire de l’existence d’une intention de communauté. Il est évident que cet élément est examiné au regard du coût de la rénovation par rapport à la valeur de l’appartement, cependant concernant un bien qui n’est pas la résidence principale de la famille, la charge de la preuve qui pèse sur celui qui demande le partage est plus importante.

En conclusion : un contrat prénuptial entre les époux avant le mariage ou pendant celui-ci est la solution qui permet d’apporter une grande certitude et une certaine clarté. Dans un tel accord, les parties se précisent mutuellement leurs intentions concernant leurs biens. Ce type de contrat est également censé éviter des conflits d’héritage.

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