La Haute Cour a précisé que même une femme ayant trompé son mari pendant une période très longue, sans qu’il en ait connaissance, a droit à la moitié du patrimoine commun, renversant ainsi la décision de la Haute Cour rabbinique.
Même une infidélité prolongée ayant durée pendant plus de dix ans ne saurait porter atteinte au droit de l’épouse de recevoir la moitié du patrimoine commun après le divorce – c’est ce qu’a jugé la Cour suprême dans une décision rendue le 24.10.22, et ce, contrairement à la position de la Haute Cour rabbinique qui a, quant à elle, tenu compte de cet élément lors de la détermination de la manière dont le patrimoine commun serait partagé entre les deux parties.
L’affaire portée devant la Haute Cour il y a environ 3 ans déjà, concernait un homme et une femme mariés depuis 46 ans et ayant eu trois enfants. Il y a neuf ans, l’époux a déposé une demande en divorce auprès du tribunal rabbinique de Rehovot, ainsi qu’une demande concernant le patrimoine. Parmi les motifs invoqués par l’époux, il a indiqué que l’épouse avait eu des relations intimes avec un autre homme durant 11 ans, parallèlement à sa vie maritale avec son conjoint, une affirmation qui s’est avérée au cours de la longue procédure qui a eu lieu entre les parties.
Les tribunaux rabbiniques locaux et d’appel vers laquelle s’est tournée l’épouse, ont eu des opinions divergentes, mais ont convergé sur le fait que si l’époux avait eu connaissance des relations intimes qu’entretenait sa femme il aurait mis fin à la vie conjugale, et que la poursuite d’une communauté de biens entre les parties, même durant la période de l’infidélité, résultait de la dissimulation des relations à l’époux. Etant donné que l’épouse a contribué à l’effort commun du foyer, la Haute Cour rabbinique a jugé qu’il n’y avait pas lieu de la priver de la totalité de sa part dans le patrimoine accumulé après la date du début de l’infidélité – mais seulement de 80% de celui-ci.
Les juges de la Haute cour Uzi Fogelman, Khaled Kavov et Anat Baron, ont fait droit à l’unanimité au pourvoi de l’épouse concernant la décision rendue par la Haute Cour rabbinique, et ont jugé comme indiqué, qu’il y avait lieu de partager le patrimoine entre les époux de manière tout à fait égale.
Selon le juge Fogelman, une infidélité sexuelle prolongée, dissimulée et ayant été sans incidence sur la gestion financière du foyer du couple, ne saurait relever de circonstances particulières dans lesquelles il serait justifié de déroger à la règle du partage égal énoncée dans la Loi sur les relations financières. Le juge a en outre ajouté, que le responsable relatif de la dissolution de la vie conjugale ne saurait être dans l’incertitude concernant la répartition des biens. Le droit civil n’est pas conçu pour guérir un cœur brisé, et de même, il est peu probable que la réponse à l’« infidélité » de la requérante envers le défendeur et sa confiance, soit la privation de sa part dans leur effort commun de maintien de l’unité familiale.
Il y a environ un an et demi, dans une autre décision rendue par la Haute Cour, surnommée « jugement de la traîtresse-parachat habogedet » dans les médias israéliens, il a été jugé par une assemblée élargie composée de neuf juges que « l’infidélité » et la «la culpabilité» sexuelle ne saurait priver des droits patrimoniaux. Toutefois, la présente décision complète des éléments qui n’avaient pas été énoncées dans le jugement de la « traîtresse ». Par exemple, l’application de la règle également dans le cas d’une infidélité prolongée.
La présente décision a non seulement réduit la compétence du tribunal rabbinique, mais également les possibilités pour les tribunaux civils de faire un quelconque usage du comportement intime des parties, en d’autres termes, il ne faut pas accorder d’importance à la question de la responsabilité de la rupture concernant la répartition des biens entre les parties et en particulier au comportement sexuel au cours de la vie conjugale.
Enfin, selon la Cour suprême « l’infidélité sexuelle prolongée » en elle-même, n’augmente ni ne diminue l’effort conjoint investi par le couple dans la vie conjugale ou dans la construction du foyer. Lorsque l’infidélité n’a pas eu d’incidence sur la conduite quotidienne du foyer, et sur la contribution à l’effort commun, la privation des droits patrimoniaux constitue dans les faits « une amende » pour le conjoint « infidèle » – une amende pour « la tromperie » elle-même.
Article paru dans Israël Magazine