mauvaise foi droit de la famille

La mauvaise foi en droit de la famille

Jurisprudence récente du tribunal de grande instance de Tel Aviv  concernant un couple franco israélien

La bonne foi ou bonne intention (en latin : bona fide) est un état intellectuel et moral d’équité et d’intégrité, ainsi qu’un principe suprême dans le domaine du droit. Une personne agissant de bonne foi estime que ses actions ne nuisent en aucun cas à autrui ou à une autre entité.

Le principe de bonne foi est l’un des concepts les plus importants du droit israélien, il est souvent utilisé en droit privé afin d’exonérer une personne de ses obligations et parfois même créer une responsabilité envers une personne lésée par un comportement relevant de la mauvaise foi.

L’obligation de bonne foi apparaît dans le droit des contrats mais l’applicabilité du principe s’étend au-delà de celui-ci, aux actions juridiques qui ne sont pas considérées comme des contrats et aux obligations qui ne découlent pas d’un contrat. Le juge Aaron Barak, aujourd’hui à la retraite, avait déterminé que – la bonne foi était l’une des doctrines générales, s’appliquant à tous les domaines du droit. Tout titulaire du droit doit exercer son obligation de bonne foi. Il s’agit d’un principe  « royal » qui établit une vérité objective de conduite souhaitable dans l’ensemble des relations interpersonnelles-.

Le principe de bonne foi a été intégré explicitement ou implicitement dans de nombreuses autres lois, même au-delà de son applicabilité en vertu de la loi des contrats, par exemple dans la Loi sur la vente, la Loi sur la location, la Loi sur le mandat, la Loi sur les valeurs mobilières, la Loi sur la vente d’appartements, la Loi sur la protection des consommateurs.

Dans le domaine du droit de la famille également, le principe de bonne foi constitue un principe de base fondamental dont le tribunal peut se servir pour obliger la personne ayant agi de manière contraire à celui-ci.

Un exemple dans le droit de la famille d’une jurisprudence qui utilise la mauvaise foi comme principe supérieur

Dans un jugement, traité par notre cabinet et rendu par le tribunal de grande instance de Tel-Aviv le 27.11.22, il était question  d’un couple ayant divorcé il y a plusieurs années. Le couple, nouveaux immigrants de France, avait signé un accord de divorce après que l’époux avait surpris sa femme en train de le tromper. Le couple avait signé l’accord de divorce à peine quelques jours après la survenance de la tromperie susmentionnée alors que l’épouse avait renoncé à ses droits dans la résidence familiale située dans un quartier luxueux et dont la valeur s’élevait à une quinzaine de millions de shekels et alors que l’épouse était inscrite comme propriétaire de la moitié des droits de la maison au cadastre. La renonciation de l’épouse sur sa part s’est faite au profit des enfants des parties.

Peu de temps après la signature de l’acte de divorce, l’épouse a intenté une action en annulation de l’accord de divorce alléguant la violence et la contrainte car son époux l’avait menacée de montrer des vidéos sexuelles d’elle à leurs enfants communs ainsi qu’à des tiers. L’épouse a affirmé qu’elle n’avait jamais travaillé en dehors du foyer et qu’elle  avait tout donné pour la maison des parties et leurs enfants et que l’accord de divorce la laissait sans rien, hormis des sommes négligeables reçues en vertu de celui-ci,  et qu’elle l’avait signé sous la pression et la contrainte sans qu’il lui ait été accordé suffisamment de temps pour en examiner les termes, et qu’elle avait accepté toutes les conditions dictées par l’époux dans l’accord sans aucune négociation. Il convient de souligner que l’accord de divorce stipulait que la loi israélienne était la loi applicable à la relation entre les parties, alors même que le couple avait signé un contrat de séparation de biens en France, au début de leur mariage, soit des décennies avant l’accord de divorce.

La demande de l’épouse concernant l’annulation de l’accord de divorce a été rejetée par le tribunal aux affaires familiales de Tel-Aviv qui a déclaré que celle-ci comprenait ce qu’elle signait. L’épouse a interjeté appel auprès du tribunal de grande instance.

Dans le cadre des débats au tribunal de grande instance les parties sont parvenues à un accord de compromis en vertu duquel l’épouse recevra la moitié de la résidence des parties et ce, après que les enfants des parties, auxquels l’épouse avait transmis ses droits, ont signifié au tribunal qu’ils s’en remettaient à la discrétion du tribunal concernant la décision.

Après l’homologation de l’accord au tribunal de grande instance, l’époux a demandé son annulation au motif qu’il n’avait pas compris ce qu’il avait signé, malgré le fait qu’une traductrice était présente à l’audience ainsi que ses  deux avocats un des deux également francophone , l’époux a également déposé une autre demande au tribunal dans laquelle il demandait l’annulation de l’accord de divorce signé entre les parties en 2017, le même accord dont l’épouse avait demandé l’annulation et pour lequel l’époux s’était battu pendant plusieurs années pour qu’il ne soit pas annulé.  L’époux a fait valoir qu’il y avait lieu d’appliquer le contrat de mariage français historique ainsi que le droit français et non le droit israélien aux relations entre les parties .

L’épouse a demandé que la demande de l’époux soit rejetée et le tribunal aux affaires familiales a en effet rejeté la demande de celui-ci en déclarant que l’époux zigzaguait entre ses versions devant les différentes instances, et abusait des procédures judiciaires.

L’époux a interjeté appel de la décision du tribunal aux affaires familiales et le tribunal de grande instance a rejeté l’appel en invoquant la doctrine de la bonne foi. Le tribunal de grande instance a précisé que l’époux ne pouvait contester l’accord de divorce de 2017 et que le comportement de l’époux constituait un abus des procédures judiciaires. Le tribunal de grande instance a conservé l’accord de compromis en vertu duquel l’épouse recevait la moitié de la résidence familiale.

Article paru dans Israel Magazine 

 

 

 

 

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