La loi israélienne permet au testateur d’imposer dans son testament certaines conditions permettant d’obliger ou de limiter un héritier à effectuer (ou à ne pas effectuer) certaines actions par rapport aux biens de la succession ou par rapport à toute autre chose (par exemple obliger l’héritier de rédiger un contrat de séparation de biens/mariage avec son épouse pour pouvoir hériter des biens de la succession, obliger l’héritier de faire son alyah etc.).
Pour ce faire, il faut préalablement vérifier que les conditions énoncées dans le testament par le testateur correspondront à la réalité future et bien souvent mouvante. Il est également important d’examiner à l’avance que de telles restrictions et obligations soient conformes à la loi applicable aux biens de la succession, au type de biens et à l’ordre publique (une condition imposant le divorce a son enfant serait considérée contraire à l’ordre public).
Des restrictions semblables peuvent être établies dans le cadre d’une donation (donc du vivant du donateur). Là encore, les restrictions doivent être adaptées de manière à anticiper le futur.
À titre d’exemple, il est possible d’inclure dans un testament ou dans un acte de donation une restriction visant à empêcher l’héritier/le donataire de faire un certain usage (vente, etc.) sur un bien immobilier hérité/donné. Ce type de restrictions peut même être inscrit au cadastre (au Taboo).
Il est recommandé au testateur qui souhaite inscrire une restriction sur un bien immobilier dont il est propriétaire, de la limiter à des cas précis et ou à l’égard de certaines personnes
Comment un testament peut-il interdire aux héritiers de vendre les biens dont ils ont hérité ?
La loi israélienne a choisi de limiter le contrôle du défunt sur sa succession à seulement deux niveaux, et ce, par le biais du mécanisme juridique nommé « héritier après héritier ». Une exception à cette règle consiste à léguer, après le deuxième niveau, aux personnes vivantes au moment de la signature du testament comme par exemple un arrière-petit-fils.
Ce mécanisme figurant dans la loi sur les successions institue un ordre selon lequel le testateur lègue ses biens à un 1er héritier, mais, au décès de ce 1er héritier, un 2ème héritier (nommé en amont dans le testament) héritera de la succession.
Le testateur peut imposer des limites au 1er héritier afin de sécuriser le 2ème. Cependant, tant que le testateur n’a pas fixé de telles conditions, le 1er héritier peut disposer des biens de la succession comme bon lui semble excepté les léguer par testament. Autrement dit, en l’absence de limitations introduites dans le testament initial (par le testateur), le1er héritier peut faire ce qu’il veut des biens hérités sauf les léguer par testament.
Comme expliqué ci-dessus, même si le testateur n’a pas mentionné dans son testament de clauses spécifiques empêchant le 1er héritier de faire ce qu’il veut des biens reçus dans la succession, la loi lui interdit de léguer par testament les biens qu’il a reçus à une autre personne.
La priorité du 1er héritier n’est donc pas absolue. Néanmoins, les restrictions sur l’utilisation des biens dépendent uniquement de la volonté du testateur et de lui seul, et c’est le plus important. L’essence même du système d’« héritier après héritier» repose sur le respect de la volonté du défunt – à savoir celle de contrôler ses biens après son décès, par le biais de certaines limites.
Par exemple : en 2018, une action en justice a été intentée par l’association « Laissez vivre les animaux » contre les héritiers d’une défunte par rapport à l’étendue du pouvoir de contrôle de cette défunte après le décès du 1er héritier (nommé dans son testament). Dans cette affaire, la mère décédée avait trois enfants et l’une de ses filles souffrait de problèmes mentaux. La mère avait acheté un appartement pour que sa fille souffrante puisse y vivre et avait légué, dans son testament, cet appartement à ses autres enfants afin qu’ils en soient les administrateurs à l’égard de la fille souffrante tout au long de sa vie. Par la suite, la fille souffrante décéda sans descendance. Conformément à la volonté de la mère les autres frères devaient hériter de l’appartement, via le mécanisme d’« héritier après héritier ».
Après le décès de la mère, les frères sont parvenus à un accord entre eux, dans le cadre duquel la fille souffrante hériterait de la propriété de l’appartement, sans application du mécanisme de gestion par les autres frères. Lors du décès de la fille souffrante, il s’est avéré qu’elle avait rédigé un testament léguant l’appartement à l’association « Laissez les animaux vivre », et non aux frères, comme la mère l’avait souhaité dans son testament. Le tribunal a accepté la position des frères, selon laquelle l’accord entre frères et sœur était soumis à la disposition du testament de la mère – testament qui était valide dans la mesure où l’on avait affaire aux deux niveaux de succession autorisés par la loi. La fille était la 1ère héritière dans le mécanisme d’« héritier après héritier », et était donc autorisée à utiliser l’appartement dont elle avait hérité, mais pas à le léguer à une personne ou à une association autre que ses frères.
Mise en place du mécanisme juridique nommé « TRUST »
La question de savoir s’il est approprié de permettre au défunt de contrôler le sort de sa succession longtemps après son décès est politico-juridique. La loi israélienne a ainsi choisi de limiter ce contrôle à seulement deux niveaux , en instaurant le mécanisme évoqué ci-dessus appelé « héritier après héritier ».
La solution à envisager pour ceux qui voudraient continuer à contrôler la gestion de leurs biens même après leur décès est d’établir un trust. Le trust est, quant à lui, un mécanisme juridique permettant de léguer des biens et de les gérer pour une durée illimitée, tant qu’il y a des actifs et des biens relevant de la succession, et ce, conformément aux instructions du testateur.
Article paru dans Israel Magazine