LES PARTIES D’UN COUPLE – OÙ L’UNE D’ENTRE ELLES VIT EN ISRAËL, ET L’AUTRE EN FRANCE – AYANT EU UNE RELATION AMOUREUSE SONT-ELLES CONSIDÉRÉES COMME DES « CONCUBINS » SELON LA LOI ISRAÉLIENNE ? QU’A DÉCIDÉ LE TRIBUNAL ?
Dans un conflit survenu entre un couple – dont les deux parties sont indépendantes de profession, l’une israélienne vivant en Israël et l’autre française vivant en France – qui entretenait une relation amoureuse par épisodes, le tribunal familial de Tel-Aviv a été appelé à se prononcer sur la question de savoir si une relation transcontinentale (c’est-à-dire lorsque l’une des parties vit de manière permanente en Israël et l’autre en France) répond à la définition de concubinage. Le tribunal a rejeté l’affirmation selon laquelle les parties étaient des concubins. Et ceci, car la plupart du temps, elles ne vivaient pas ensemble et chacune d’elles vivait dans un pays différent, y menait sa vie et finançait ses dépenses quotidiennes via des fonds séparés. Il est à noter que, dans ce cas, il n’a pas été question de résidences séparées temporaires, mais bien d’une situation permanente caractérisant la relation entre les parties tout au long de sa durée et ne permettant, dès lors, pas de reconnaître le concubinage.
Dans cette affaire, la partie française avait acheté un appartement à Tel Aviv via son propre capital, au tout début de leur relation amoureuse et avait permis à la partie israélienne d’y vivre en contrepartie d’un loyer, mais sans signer de contrat de location – le loyer s’élevait plus ou moins au remboursement mensuel de l’hypothèque applicable à l’appartement. Étonnamment, à la fin de leur relation, la partie résidant en Israël a demandé au tribunal d’être reconnue comme propriétaire de la moitié de l’appartement et que leur couple soit reconnu comme un concubinage, bien qu’elle souhaitât rompre la relation amoureuse. La demande en vue de reconnaître le couple comme des concubins a été rejetée, mais curieusement, le tribunal a partiellement fait droit à la demande de la partie israélienne quant à l’appartement, en déclarant qu’elle avait droit à 25 pour cent de cet appartement, même si le montant du remboursement mensuel de l’hypothèque était plus ou moins similaire à celui du loyer que la partie française aurait perçu si elle avait loué son appartement à un tiers. En 2023, un appel interjeté par les deux parties a été déposé contre ce jugement. La décision relative à l’appel n’a pas encore été rendue.
Il importe de noter que si la partie française avait exigé de la partie israélienne de signer sur un contrat de location reflétant les relations contractuelles entre elles concernant l’appartement, tout le conflit aurait été évité. En hébreu, nous disons סוף מעשה במחשבה תחילה ce qui veut dire « une pensée bien réfléchie mène à bout » ou bien « la fin justifie les moyens».
En conclusion : il est fortement conseillé d’examiner attentivement vos relations au regard du droit israélien et de ne pas lésiner, ni hésiter à consulter des experts en droit israélien.
LES CONCUBINS VERSUS LES COUPLES MARIÉS
Beaucoup d’entre vous ne le savent peut-être pas, mais la régulation du statut juridique des concubins ainsi que les facteurs établis pour les reconnaître comme tels n’ont pas encore été réglementés par la législation en Israel. Dans la pratique, le statut des concubins se développe principalement dans la jurisprudence et devient égal à celui des couples mariés. Malgré tout, leur statut n’est pas encore tout à fait identique à celui des couples mariés.
Quant aux couples, mariés civilement, en dehors d’Israël, ayant reçu le droit d’être enregistrés comme mariés dans le Registre israélien de la population, leur statut équivaut à celui d’un couple marié. Ils ne sont, dès lors, pas considérés comme des concubins mais bien comme des conjoints mariés, et ce, à tous les égards.
LE STATUT DES CONCUBINS
En principe, les conditions de base pour établir le statut de concubinage sont la cohabitation et la gestion commune du ménage. Toutefois, les époux peuvent être reconnus par les tribunaux comme concubins, même si certaines des caractéristiques communes d’une relation conjugale – telles que les relations intimes, la fidélité mutuelle et l’habitation commune permanente – n’existent pas.
Le tribunal israélien a, par exemple, reconnu des conjoints comme étant des concubins bien que l’élément de la cohabitation n’ait pas été strictement rempli.
Par ailleurs, de nombreuses lois israéliennes incluent le terme de « concubins » dans la définition de « conjoints » (cette notion ne comprend donc pas uniquement les couples mariés), par exemple : la loi sur les successions, la loi sur la fiscalité immobilière, la loi pour la prévention de la violence intrafamiliale, la loi sur la sécurité sociale, la loi sur les familles des soldats tombés au combat, et plus encore. Il est à noter que les règlements des caisses de pension reconnaissent également la notion de concubins.
DROITS ÉCONOMIQUES
Les droits économiques des concubins sont quasiment identiques à ceux des couples mariés, à l’exception de quelques cas, comme par exemple : 1. le non-versement d’indemnités de départ à un(e) salarié(e) qui a démissionné en raison d’un déménagement en vue de vivre avec son(sa) concubin(e) ; 2. les abattements d’impôt sur les revenus relatifs aux conjoints.
DROITS LIÉS À LA PARENTALITÉ
Les enfants biologiques issus de couples concubins ont exactement les mêmes droits que ceux issus de couples mariés.
Lorsqu’il s’agit de déterminer les droits de visite et d’hébergement, la garde des enfants, la tutelle sur les enfants et la pension alimentaire due aux enfants, il n’y a aucune différence entre les couples mariés et ceux vivant en concubinage.
PENSIONS ALIMENTAIRES DUES AU(À) (LA)CONJOINT(E) ET KETOUBAH
Il va de soi qu’une concubine n’a pas droit à la Ketoubah, comme cela serait le cas pour une épouse d’un couple marié selon la loi juive. Cependant, il peut très certainement exister une obligation de pension alimentaire « réparatrice » à l’égard d’un concubin ou d’une concubine, le tout en fonction les circonstances de l’espèce.
LE PARTAGE DES BIENS COMMUNS DES CONCUBINS
Concernant le partage des biens communs des concubins, il existe l’obligation de prouver le statut de concubins puis de démontrer une intention de partage – selon laquelle les époux avaient l’intention de partager leurs biens entre eux (chose qui ne doit pas être prouvée pour les couples mariés qui ne sont pas soumis, via un contrat, à un régime de séparation de biens).
LES DROITS DES CONCUBINS DANS LA SUCCESSION
Les droits des concubins à hériter les uns des autres sont semblables à ceux des couples mariés, à condition qu’ils prouvent le concubinage par l’existence d’un accord de vie commune ou qu’ils satisfassent aux critères développés dans la jurisprudence relative au concubinage.
En outre, aucun des concubins ne peut avoir été marié à une autre personne, au moment du décès de l’un des deux, et à condition, bien entendu, qu’il n’y ait pas de testament stipulant le contraire.
DROITS DES CONCUBINS EN MATIÈRE DE LOGEMENT
Dans la détermination des différents droits des conjoints à recevoir une aide en matière de logement de la part du ministère de la Construction et du Logement sont inclus les concubins, y compris les couples de même sexe. En d’autres termes, les concubins bénéficient de tous les droits correspondants.
LES CONCUBINS ET LA SÉCURITÉ SOCIALE
Les concubins et les couples mariés ont les mêmes droits vis-à-vis de la Sécurité sociale. Toutefois, un processus d’inscription spécifique est requis à l’égard des concubins – incluant le remplissage de formulaires de la Sécurité sociale – en vue de pouvoir bénéficier de ces droits.
Article paru dans Israel Magazine