La Cour Suprême a statué à l’unanimité : il n’existe pas d’obligation légale entre époux de divulguer son orientation sexuelle ni ses croyances ou pratiques religieuses. Cette décision a été rendue suite à l’appel interjeté contre une décision du Tribunal de grande instance de Jérusalem.
Il y a environ cinq ans, un couple a divorcé. Pendant leur vie maritale, celui-ci a eu ensemble trois filles. L’ex-épouse et sa mère ont déposé contre l’ex-conjoint une demande auprès du Tribunal aux affaires familiales de Jérusalem, dans laquelle elles demandaient une indemnisation financière d’un montant de cinq millions de shekels, au titre des dommages psychologiques et financiers qui leur auraient été causés. Elles ont soutenu que ce dommage résultait de la fraude et de la tromperie de l’ex-époux, pendant la période précédant le mariage et pendant celui-ci.
Les défenderesses ont affirmé que l’ex-époux était homosexuel et qu’il menait ״une double vie”, alors que d’une part, il se présentait à elles comme un homme religieux et hétérosexuel, et d’autre part, il menait une vie laïque et homosexuelle.
L’appel de la décision a été renvoyé devant la Cour Suprême, qui a statué que la loi et les outils juridiques n’étaient pas le cadre approprié pour guérir les chagrins d’amour résultant des relations entre les époux, et qu’ils n’étaient pas destinés à régir les rapports amoureux. Les prétentions vis-à-vis d’un conjoint qui a caché ses véritables sentiments envers l’autre ; les véritables motivations pour créer une relation entre eux ; l’intensité de son attirance sexuelle envers l’autre conjoint ou vers les autres (hommes ou femmes) ; l’objet de son désir ; ses pensées et le fond de son cœur – tous ces éléments ne sont pas des prétentions qu’il est souhaitable de clarifier ou dont il convient de débattre devant les tribunaux.
Compte tenu de ce qui précède, il a été décidé qu’il n’y avait pas lieu de reconnaître une obligation légale pour une personne de révéler à l’autre conjoint, avant le mariage, ses penchants ou ses préférences. En outre, il a été précisé que le débat concernant de telles actions peut conduire à un engorgement des tribunaux, se fondant sur la non divulgation des sentiments et émotions intimes au sein des couples. Cela n’est pas souhaitable et ce, pour des considérations pratiques et utilitaires du système judiciaire.
Ainsi, il a été décidé qu’il n’y a pas non plus lieu de reconnaître une obligation légale de divulguer au sein du couple ses croyances ou pratiques religieuses, dans la mesure où ce sujet fait partie de la sphère personnelle, émotionnelle et intime du conjoint. Il résulte de ce qui précède, qu’il y a lieu d’annuler le jugement rendu par le Tribunal de grande instance, et de confirmer le jugement rendu par le tribunal aux affaires familiales rejetant la demande des défenderesses.
Le juge N. Solberg a souligné : “en dépit du résultat, il n’y a pas lieu de considérer cette décision comme un sceau approuvant ou donnant un fondement moral à la dissimulation de caractéristiques ou détails importants au sein du couple avant le mariage”.
Le juge Fogelman a souligné que la volonté d’une personne de maîtriser l’information concernant son orientation sexuelle se fonde sur le fait que la détermination de cette dernière résulte d’un “processus personnel et progressif, qui s’accompagne souvent d’un prix personnel lourd d’un point de vue personnel, familial et social. Imposer une obligation légale de divulgation reviendrait à forcer une personne à révéler ses pensées concernant son orientation sexuelle même si elle ne s’est pas concrétisée ou conduirait au contraire à ne pas les réaliser.
Article paru dans TLV Magazine